Salaün
Magazine
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DOSSIER |
L'Ouest américain
revanche spectaculaire. Lorsqu'il meurt,
l'arbre de Josué s'affaisse dans une lente
agonie et forme une dépouille poignante
qui rend le paysage plus fascinant
encore.
L'homme qui foule la poussière, évite
l'épine et la morsure, embrasse l'immen-
sité et les sommets du désert Mojave, qui
s'élèvent à 1800 m, est forcé à l'humilité.
Ses traces passées et présentes sont dis-
crètes. Malgré l'immensité, on échange
avec plus de douceur qu'ailleurs. Face à
la magnificence d'un tel environnement,
on se sent plus petit, plus fragile, mais
aussi plus proche et plus complice que
sur le parvis de bien des cathédrales.
La mère des routes
La
Mother
Road
, celle qu'empruntèrent
l'écrivain Jacques Kerouac et ses amis
pour gagner Los Angeles à partir de
Chicago, est le surnom de la Route 66.
4000 km de mythe, dont il reste de ma-
gnifiques tronçons. On pouvait craindre
une récupération de cet interminable ru-
ban d'asphalte pour en faire une attrac-
tion tapageuse. C'est tout l'inverse. On
ne peut rien contre l'immensité. L'im-
pression de solitude, l'ivresse des grand
espaces, l'appel du désert saisissent for-
cément celui qui l'emprunte, qu'il soit
au guidon d'une Harley-Davidson, au
volant d'une décapotable, d'une voiture
familiale ou derrière les vitres d'un au-
tocar de grand tourisme. En venant de
Joshua Tree par l'ouest, on doit parfois
se pincer pour s'assurer que l'on est bien
là, sur la mère des routes, à la tombée
du jour et sans âme alentour, tant l'on
pourrait croire qu'il s'agit ici encore
d'une production hollywoodienne. On
s'arrête dans un drive-in qui est tout à
la fois une authentique gargote de bord
de route, un décor de cinéma mythique
et une attraction touristique. Louise, res-
ponsable du musée de la Route 66 de
Kingman, nous rappelle que la mère des
routes est loin d'être un décor : « Elle fut
la première à relier l'Amérique d'est en
ouest, en suivant les pistes empruntées
par les Indiens. Elle fut d'ailleurs précé-
dée par le télégraphe, puis le train. C'est
également cette route qu'empruntèrent
les pionniers qui se lancèrent dans la
ruée vers l'or, puis les paysans ruinés
par la crise de 1929. Ils furent contraints
de prendre la Route 66 pour fuir la
misère et refaire leur vie plus à l'ouest
en Californie. C'est aussi l'Amérique de
Steinbeck, cette période terrible si bien
