Salaün Magazine n°7 - page 53

Salaün
Magazine
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dans les rues en regardant, étonnés, des
militaires équipés de masques à gaz les
croiser sans un mot ; d'autres participaient
ce jour-là à une randonnée qui faisait le
tour de la centrale.
Ce n'est qu'au bout de 30 heures que les
autorités décidèrent d'évacuer la ville.
Plus de 2200 cars furent mobilisés pour
vider la ville en quelques heures. La
population, à laquelle on assura qu'elle
serait de retour chez elle sous deux ou
trois jours, fut invitée à tout abandonner
derrière elle. Elle ignorait qu'elle quittait
Pripriat pour toujours.
La ville modèle raconte encore aujourd'hui
ces heures dramatiques. Même si la forêt
reprend peu à peu son territoire perdu,
Pripriat offre à la vue l'image d'une car-
casse vide, silencieuse, inquiétante. Les
grands bâtiments sont toujours debout,
mais ils ont perdu portes et fenêtres et
sont livrés aux graffitis. À l'intérieur des
édifices publics, on devine la fuite préci-
pitée, l'abandon forcé ; dans les salles de
classe, les livres jonchent le sol, et sur les
tableaux, on peut encore lire les derniers
cours du maître ; au commissariat, les
policiers ont juste pris le temps de sortir
les prisonniers de leur cellule ; au parc
d'attractions, les autos-tamponneuses sont
encore en piste.
Le spectacle est poignant. Glauque aussi.
Car plus que le temps, ce sont les pillards
et les vandales qui ont achevé de vider
Pripriat et de la saccager.
La cité radieuse est aujourd'hui radiée.
Comme soufflée par un mauvais vent
qui aurait aussi balayé ses habitants, les
arrachant à un quotidien tranquille.
La centrale Lénine, qui lui avait donné vie
l'a condamnée à mort et jetée dans l'oubli.
Pripriat est une ville fantôme. Une ville de
fantômes. Ceux du 26 avril 1986, dont on
ne connaîtra jamais le nombre.
REPORTAGE |
Tchernobyl
Pripriat offre à la vue
l
'
image d
'
une carcasse
vide,
silencieuse, inquiétante...
Page de gauche : le réacteur n°4 sera recouvert d'un
sarcophage métallique. Construit à côté du réacteur, celui-ci
sera glissé sur rail au-dessus du coffrage en béton coulé au
lendemain de la catastrophe.
Page de droite : la ville de Pripriat, où vivaient le personnel
de la centrale et sa familles, a été abandonnée en quelques
heures et ressemble aujourd'hui à une ville fantôme.
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