Salaün
Magazine
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REPORTAGE |
L’Argentine
à la décision du commandant qui doit
évaluer l’évolution probable du temps
dans les deux heures à venir. Hors de
question de prendre le moindre risque. Il
faut être sûr de pouvoir débarquer dans
des conditions gérables, mais aussi être
sûr de pouvoir ramener tout le monde
à bord !
À 7h, le commandant donne son accord
à un débarquement. Il n’y a plus une mi-
nute à perdre. Les marins ont déjà assuré
une navette jusqu’à la petite crique où
nous accosterons, pour y installer des
passerelles qui nous éviteront de nous
mouiller les pieds.
Après une descente à terre un peu spor-
tive, on attaque la montée de la falaise.
Une grimpette aménagée mais qui,
à 7 heures du matin, vous laisse sans
jambes.
Sur le sommet de l’île, on peut mesurer
combien le Horn mérite son surnom de
« cap dur ». Sous une bruine
froide, balayé par un vent
glacial, le plateau offre un
paysage de désolation, oc-
cupé par une végétation de
tourbières, de mousses et
de landes.
C’est dans ce décor triste et
oppressant que les Chiliens ont installé
– en 1990 – une petite base militaire qui
compte un phare, une maison de gar-
dien, une chapelle, un bâtiment tech-
nique. Un officier de marine veille sur
cet ensemble. Celui qui nous a reçus, en
grande tenue, terminait un séjour d’un
an sur l’île, avec sa femme et ses deux
filles, âgées de 13 et 8 ans. Élégant,
accueillant et disponible, il assurait que
ce séjour s’était déroulé sans problème,
même s’il ne dissimulait pas sa joie de
retrouver la civilisation au terme de ces
12 mois de vie d’ermite.
Dans le bâtiment, un petit musée a
été aménagé. On y trouve essentielle-
ment des souvenirs laissés par les rares
navires à avoir fait escale au Horn. La
Jeanne d’Arc
est de ceux-là.
À quelques mètres de là, une stèle se
dresse en hommage aux capitaines cap-
horniers français. Un autre monument a
été érigé à la mémoire de tous les marins
disparus en tentant de franchir le cap
perdu. Mais, comme s’il voulait mon-
trer qu’il restait le plus fort, le vent l’a
récemment arraché à son socle.
Au bout d’une petite heure, notre visite
SOUS UNE BRUINE FROIDE,
BALAYÉ PAR UN VENT GLACIAL,
LE
PLATEAU OFFRE UN PAYSAGE
DE DÉSOLATION