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Salaün

Magazine

| Page 13

L

AVENUE DES GLACIERS, UN CANAL

MAJESTUEUX

BORDÉ DE HAUTES

MONTAGNES QUI LAISSENT FILER

À L

EAU DES GLACIERS IMMOBILES

LUMINEUX DANS LA NUIT TOMBÉE.

Mais le moment est venu de regagner le

Stella Australis

, mouillé au milieu d’une

baie grandiose, d’une beauté exception-

nelle.

En fin d’après-midi, le paquebot reprend

sa navigation. Direction : le cap Horn

par l’Avenue des glaciers, un canal ma-

jestueux bordé de hautes montagnes qui

laissent filer à l’eau des glaciers immo-

biles lumineux dans la nuit tombée. Ils

portent des noms de pays – Romanche,

Allemagne, France, Italie, Hollande –

en l’honneur des alpinistes qui les ont

gravis.

13 octobre

Aujourd’hui, c’est le grand jour : nous

avons rendez-vous avec le cap Horn.

Toute la nuit, le

Stella Australis

s’est

faufilé de canal en canal pour jeter

l’ancre, ce matin, un peu avant le lever

du jour, à quelques encablures du cap

mythique.

Cette longue route nocturne a été l’oc-

casion de prendre la mesure, dans la

pénombre de la passerelle de comman-

dement, en compagnie du chef de quart

et du timonier, de la complexité de la

navigation dans cette Terre de Feu, dans

ces canaux qui s’ouvrent devant l’étrave

sans jamais livrer leurs secrets. Mènent-

ils à une mer libre ? Se ferment-ils sur

une impasse en forme de piège ?

Aujourd’hui, on le sait, mais il en était

tout autrement à l’époque de Magellan

ou même de FitzRoy, quand la carto-

graphie était encore incomplète et très

imprécise.

À un certain moment, le

Stella Australis

se glisse dans un trou d’aiguille à peine

large de 500 m, sommairement balisé

par deux feux qui scintillent, comme

suspendus dans la nuit noire.

Pour le petit paquebot, c’est une for-

malité. Ses deux moteurs lui permet-

traient de pallier à toute mauvaise sur-

prise. Pour un bateau à voile, ces étroits

canaux peuvent se révéler des pièges

mortels. En quelques minutes, des vents

d’une extrême violence – les williwaws

– peuvent dévaler des hauts sommets

glacés et dévaster les plans d’eau, préci-

pitant les bateaux à la côte.

Durant cette nuit, le temps, jusqu’alors

exceptionnellement clément, s’est dé-

gradé. La mer et le ciel se confondent

dans une grisaille peu engageante.

Le débarquement sur l’île du bout du

monde n’est pas acquis. Il est soumis

Page de gauche : l’Avenue des glaciers.

Ci-dessus : au pied du glacier Pia.

Double page suivante : les manchots de Magellan sur l’île de Santa Cruz, vues par Ronan Olier.

REPORTAGE |

Argentine