Salaün
Magazine
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On reprendrait bien un peu de désert. Voilà plusieurs jours que nous
flirtons avec le désert de Gobi. C’est normal. Vu qu’il mesure plus d’un
million de km
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et qu’il représente un bon tiers de la Mongolie. D’ouest en
est, jusqu’à la Chine. Mais nous restions un peu sur notre faim. Un bout
de dune de sable doré par ci, un plateau caillouteux par là… Nous espé-
rions que cette avant-dernière étape en Mongolie nous donnerait l’occa-
sion de plonger un peu plus dans l’un des plus vastes déserts du monde.
Une centaine de kilomètres après avoir quitté – non sans regret, car c’est
une ville étonnante et accueillante – Ulan Bator, nous abandonnons la
route bitumée pour retrouver les pistes que nous connaissons bien. Des
traces qui partent dans le plus grand désordre vers un horizon incertain.
Lorsque le point de vue le permet, on a l’impression de se retrouver
devant la gare de triage de Trappes. On fait donc son choix. En fonction
des impressions du moment, des nuages de poussière que l’on distingue
au loin et qui laissent présager le passage d’un camion ou d’une voiture.
Sans, surtout, jamais perdre de vue les pylônes en charge de conduire
l’électricité jusqu’à la ville dont vous avez fait votre destination. Ou,
encore, la ligne du train transmongolien qui rallie Ulan Bator à Pékin.
Faire la route au compas
Mais il arrive que les pistes s’en éloignent ou que leurs traces se perdent
sur les plateaux arides. Car, mine de rien, on est bien dans le désert
de Gobi. Même si les dunes n’en font pas le paysage. Il n’y a plus de
villages, juste quelques yourtes habitées par les derniers bergers. Il faut
alors se débrouiller. A bord de Boris, notre bon vieux sens marin va donc
prendre les choses en main. La carte est sommaire mais elle nous place
Saïnshand bien au sud alors que nous faisons du plein est. Changement
de cap. On va se faire notre route au compas. Comme en mer… Et au
bout d’une heure, nous tombons pile poil sur la petite ville minière de
Choïr. Et son épicerie-quincaillerie avec un frigo rempli d’eau fraîche et
de quelques conserves propres à alimenter un pique-nique. Elle a aussi,
comme autre vertu, de se situer en bordure de la route que nous devons
suivre pour gagner Saïnshand, à 150 kilomètres de là. Un panneau déri-
soire nous le confirme. Il n’y a plus de bergers, plus de moutons, plus de
chevaux. Juste deux gazelles, gracieuses, qui détalent en bondissant,
à notre arrivée. Il ne nous reste plus qu’à savourer cette fin de journée,
dans un décor de western, monotone, desséché, même si la piste garde
encore les signes des pluies qui, quelques semaines plus tôt, l’ont creu-
sée de ravines piégeuses.
Elles le sont d’autant plus qu’un orage a levé une tempête de sable qui
noie le paysage et fait du capot de votre voiture le seul horizon percep-
tible. Et puis, au sommet d’une petite colline apparaît enfin un long ruban
de bitume que Boris avalera avec gourmandise. Quand nous arrivons à
Saïnshand, l’orage, lassé de balayer du sable et de la poussière, nous
gratifie d’une pluie à grosses gouttes. Comme chaque soir depuis que
nous sommes en Mongolie. A croire que nous trimbalons depuis la Bre-
tagne notre arrosoir !
Demain, c’est la frontière chinoise…
Extrait du carnet de route >>>>> >>>>> 22 juin. Mongolie. Ulan Bator – Le désert de Gobi - Saïnshand
Traversée de
chameaux dans le
désert de Gobi.
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