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faits de petites maisons de bois et ponctués d’églises, de com-

merces et de snacks de bord de route. De ce décor un peu fade

émergent ici et là d’impressionnantes demeures invariable-

ment installées le long du Mississippi : ce sont les anciennes

plantations de canne à sucre qui se comptent par dizaines.

Celle de Destreham, fondée par un Français, est la plus an-

cienne et la plus proche de La Nouvelle-Orléans. Après avoir

appartenu à la raffinerie American Oil, elle est désormais ou-

verte au public. Certaines scènes du film

12 years a slave

y

ont été tournées.

À la fois fascinantes sur le plan architectural, par la beau-

té de leur environnement direct et les richesses qu’elles

contiennent, elles donnent aussi la chair de poule eu égard

à leur passé. Les descendants d’esclaves, souvent devenus

ouvriers des plantations

et des raffineries, habitent

toujours le long de la rivière

et sont désormais asso-

ciés au travail de mémoire

qui anime la région. Au

xx

e

siècle, les propriétaires

ayant décidé de restaurer ces

demeures souvent délabrées

se sont attachés à évoquer

le train de vie, le faste et le

raffinement de la vie à l’âge

d’or des plantations. Évo-

quer le temps d’

Autant en

emporte

le vent permettait

de passer sous silence ce-

lui de l’esclavage. Les cases

d’esclaves étaient alors dé-

montées et on préférait ad-

mirer les grands chênes, les

colonnades néo grecques et

l’argenterie familiale.

Portées par un regain d’in-

térêt du public pour le tou-

risme de mémoire, plusieurs

plantations, à commencer

par celle de Whitney, ont

pourtant fait le choix in-

verse. Dans un État où la

question reste sensible, elle

a eu le courage de consa-

crer le musée qui jouxte sa

plantation à l’histoire des

hommes et des femmes qui y furent réduits en esclavage.

Elle a notamment construit des mémoriaux, un petit musée

et préservé les cases où vivaient les esclaves. La revue améri-

caine National Geographic estime aujourd’hui que “Whitney

est la plantation que tout citoyen américain devrait visiter”.

En quittant Whitney, le simple fait de longer les clôtures

d’une autre plantation, celle d’Evergreen, isolée au milieu

des champs de canne à sucre, donne le frisson. Toujours en

activité, elle a elle aussi conservé des traces de l’esclavage et

servi pour le tournage du film de Quentin Tarantino

Django

unchained

.

La plantation Laura est un autre lieu de mémoire important,

notamment pour les francophones, de par sa belle architec-

ture créole, mais surtout par l’accent mis sur la culture des

esclaves originaires d’Afrique de l’Ouest.

Autre joyau architectural créole, colorée, exubérante et

presque avalée par une énorme raffinerie, la plantation San

Francisco, elle aussi liée aux sucriers français et allemands

en dit long sur la richesse inouïe des planteurs de l’époque.

En tout, une dizaine de plantations se visitent et plusieurs

proposent des hébergements. La superbe Houma House, une

des dernières plantations en direction de Bâton Rouge, est

même dotée de deux restaurants haut de gamme et d’un bar.

Fastueuse, chargée d’histoire et d’objets évoquant l’âge d’or

des plantations, elle offre une halte hors du temps sur la route

de l’Ouest. Comme les autres plantations, elle a perdu sa vue

sur le Mississippi car d’impressionnantes levées ont été éri-

gées pour empêcher le fleuve de déborder. On peut cependant

parcourir les levées à vélo et admirer le curieux ballet des

barges pétrolières et des bateaux de croisière à vapeur sur le

Mississippi.

l

acadiana

,

le pays cajun

Pour le visiteur francophone, l’Acadiana est certainement

l’étape la plus fascinante d’un voyage en Louisiane. À partir

La centaine de kilomètres qui relie La

Nouvelle-Orléans à Bâton Rouge suit en effet

les méandres prononcés du fleuve mais aussi

de l’histoire de la Louisiane.

Le long de la River Road, qui suit les berges du Mississippi, de multiples plantations historiques rappellent

le temps où la canne à sucre faisait la richesse des colons, grâce à l’esclavage.

reportages

d

ici

et

d

ailleurs

|

la

louisiane

Salaün

Magazine

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